Résumé du rapport du Comité Chrétien de l’Industrie (CIC)
de Hong-Kong sur les conditions de travail dans les usines
sous-traitantes fabricant des produits Disney



Conditions de l’étude :


De mars à novembre 2000, le comité chrétien de l’industrie (CIC) de Hong Kong, a enquêté sur les conditions de travail dans 12 usines sous contrat avec Disney, dans la province de Guangdong en Chine du Sud. Cinq d’entre elles étaient des usines de jouets, deux de vêtements, trois d’accessoires, une de plastiques et une de montres. Certaines sont des fournisseurs réguliers de Disney, d’autres sont saisonniers. Toutes produisaient pour Disney au moment de l’enquête. La plupart des produits manufacturés dans ces usines devaient être exportés en Amérique du Nord et en Europe. Au moins une usine produisait pour exporter au Canada. Le CIC a interrogé de 5 à 15 ouvriers/ères de chaque entreprise.

Profil de l’ouvrier/ère :

La grande majorité des ouvriers/ères dans les 12 usines sont jeunes, célibataires, de sexe féminin, migrants des zones rurales des provinces intérieures. La plupart ont entre 18 et 30 ans, bien que certains aient à peine 16 ans.

Conclusions générales et recommandations :

Bien que Disney proclame que son code de conduite et son système de contrôle soit-disant « indépendant » assure le respect des droits des ouvriers dans les entreprises sous-traitantes en Chine et dans d’autres pays, le CIC a constaté que les violations du code de conduite de Disney et de la loi du travail chinoise étaient monnaie courante. Ces violations incluent : une durée excessive de la journée de travail, des salaires de misère, des amendes déraisonnables, une mise en danger sur le lieu de travail et des dortoirs dangereusement surpeuplés. L’étude conclut que le code de conduite Disney et le système de contrôle ont peu ou pas d’effet pour les ouvriers/ères.
L’étude a aussi constaté que peu des ouvriers interrogés étaient au courant du code de conduite Disney et de son système de contrôle, et que les ouvriers qui avaient eu connaissance du code et/ou avaient été interrogés par les enquêteurs, avaient été souvent l’objet de menaces et d’intimidation dans le but de falsifier les rapports sur le travail ou de les forcer à répondre aux questions des enquêteurs de manière « appropriée » selon des scénarios préparés par la direction.

Le rapport recommande que Disney prenne les dispositions suivantes :

1) promouvoir la formation aux droits des travailleurs sur le lieu de travail ;
2) associer activement les ouvriers/ères dans le processus de contrôle en cours sur le lieu de travail ;
3) procurer des moyens de communication accessibles et fiables (ex. : boîte aux lettres dans les usines avec des enveloppes affranchies) pour que les ouvriers/ères fassent parvenir leurs plaintes à l’entreprise ou aux tierces personnes intéressées ;
4) garantir qu’il n’y aura pas de représailles contre les ouvriers/ères qui déposent ces plaintes ;
5) surveiller strictement la conformité avec la loi et assister les sous-traitants pour qu’ils soient en conformité avec les lois nationales du travail et le code Disney au lieu de simplement couper les ponts et s’enfuir quand les violations de droits sont découvertes, les entreprises devraient travailler avec les usines non conformes pour améliorer les conditions de travail et les pratiques ;
6) divulguer toute l’information sur ses sous-traitants pour un examen minutieux accessible au public.

Les auteurs de ce rapport ne révèlent pas les noms des usines objets de l’enquête cette fois-ci, pour s’assurer que Disney ou ses sous-traitants ne vont pas utiliser le rapport pour pénaliser les usines sous contrat et ainsi faire doublement le malheur de leurs ouvriers/ères. Le CIC continuera à surveiller les usines et envisage de mener des actions plus vigoureuses si les conditions dans les usines restent sans changements.

Conclusions spécifiques :

1 – Salaires

La plupart des ouvriers interrogés recevaient entre 49 US$ et 85 US$ par mois, y compris les heures supplémentaires. Etant donné la longueur de leur journée de travail, c’était moins que le salaire légal minimum. Dans les fabriques de jouets, la plupart des ouvriers étaient payés de 37 à 61 US$ par mois. Beaucoup étaient payés à la pièce et la plupart de leurs heures supplémentaires n’était pas payées intégralement. Plusieurs usines ne donnaient pas de fiches de paye et dans celles où ils en donnaient la manière dont la paye était calculée n’était pas claire. Il est courant pour les usines de payer les ouvriers avec un mois de retard, certaines ont 2 mois de retard.

2 – Horaires de travail

En période de pointe, les horaires de travail vont de 13 à 17 heures par jour, 7 jours sur 7, d’une seule traite pendant des mois. Dans quelques usines, on fait pression sur les ouvriers pour le travail de nuit. Les ouvriers ne peuvent pas refuser les heures supplémentaires. Dans une usine, un ouvrier interrogé en août dit qu’excepté les vacances de 4 jours du Nouvel An chinois, il a eu seulement 2 jours de repos cette année.

3 – Nourriture et logement

Les dortoirs surpeuplés, partagés par 10, 12 ou 14 ouvriers/ères dans une seule chambre, sont courants. Dans une usine, 21 à 24 ouvriers partageaient une chambre pour une personne, dormant sur des lits superposés à trois étages. Dans certains dortoirs, le couloir entre deux rangées de lits ne laisse pas assez de place à deux personnes pour se croiser. Le surpeuplement crée un sérieux risque en cas d’incendie. Les plaintes à propos de la nourriture des cantines d’usines sont courantes. Dans une usine, les ouvriers ont dit que leur nourriture était « pire que de la nourriture pour les cochons ».

4 – Santé et sécurité

Les ouvriers/ères ne sont généralement pas au courant des thèmes de santé et sécurité. Plusieurs ouvriers se sont plaints que la direction distribuait des gants et des masques seulement quand les visiteurs venaient à l’usine. Plusieurs ouvriers se sont plaints de maux de gorge fréquents. Dans une usine, les ouvriers se sont plaints de la mauvaise odeur des peintures dans la section aérosols.

5 – Amendes et frais

Les ouvriers ont déclaré qu’ils ont des amendes pour : parler au travail, arriver en retard, sortir sans permission, oublier d’éteindre les lumières des dortoirs pendant la journée, jeter des papiers dans la cantine, etc. Dans une usine les ouvriers ont dit que s’ils étaient pris en train de fumer pendant la période de pointe de la production, ils avaient une amende à payer, mais en basse saison ils avaient une amende et étaient renvoyés. Dans une usine des ouvriers doivent payer, quand ils commencent à travailler, les frais d’une carte temporaire de résident ainsi que leur uniforme. Dans une autre, leurs outils, leurs uniformes et la carte d’identité de l’usine.

6 – Sécurité sociale

En violation de la loi chinoise, la plupart des usines ne participent pas au système de sécurité sociale en vigueur, déniant ainsi aux ouvriers les bénéfices auxquels ils ont droit en cas de retraite, accident du travail ou décès.

7 – Liberté d’association

Il n’y avait de syndicat dans aucune des usines soumises à l’enquête et la plupart des ouvriers interrogés ne savaient pas ce qu’est un syndicat. Dans une usine les ouvriers ont signalé qu’il y avait eu une grève au printemps à cause des arriérés de salaires non payés. A la fin la direction a payé les salaires dus mais tous les ouvriers qui avaient participé à la grève ont été licenciés. Dans une autre usine, les ouvriers signalent qu’il y a eu plusieurs grèves, la plupart pour des retards dans le paiement des salaires. Parmi ceux qui avaient participé à la grève en avril, ce sont les hommes qui ont été renvoyés. En dépit du nombre de grèves qui avaient eu lieu dans l’usine, les ouvriers/ères interrogés ne savaient pas ce qu’était un syndicat et pensaient que le mot « union » pouvait signifier une assemblée le matin. Dans une troisième usine, un vigile qui faisait circuler une pétition pour protester contre la mauvaise qualité de la nourriture a été immédiatement licencié.
En octobre, plus de la moitié des employés d’une usine ont été obligés de se mettre en congé sans solde. Selon les ouvriers interrogés, c’est la même chose qu’être renvoyés. Lorsque les nouvelles commandes arrivent, la direction écrit soi-disant aux ouvriers pour leur demander de reprendre le travail, cependant ils sont traités comme les nouvelles embauches. Dans une autre usine les employées signalent que si une ouvrière démissionne, elle doit faire une croix sur les salaires dus et n’est pas autorisée à récupérer ses affaires personnelles dans le dortoir.
Au moins une usine sous-traite illégalement des commandes Disney dans d’autres usines.

Code Disney et Programme de Surveillance :

1 – Connaissance du code

La plupart des ouvriers/ères interrogés ne connaissaient pas le code de conduite Disney. Il était affiché dans seulement 3 usines. Les ouvriers/ères qui l’avaient vu ou en avaient entendu parler n’étaient en général pas au courant de son contenu et de ses buts. Très peu réalisaient que ce code était destiné à protéger leurs droits.

2 – Surveillance

Les ouvriers/ères interrogés ont parlé de visiteurs dans les usines, mais en général ils ne savent pas qui ils sont – acheteurs, représentants de Disney, contrôleurs Disney, fonctionnaires du bureau du travail ? Aucun des ouvriers/ères n’a parlé à des visiteurs ou vu d’autres leur parler. Ils ont signalé qu’ils avaient peur de parler aux visiteurs parce qu’ils n’avaient pas de garanties qu’ils ne seraient pas punis pour ça.

3 – Ruses de la direction

Les ouvriers/ères de 2 usines ont signalé que leurs usines sont nettoyées de fond en comble avant l’arrivée de visiteurs. Les ouvriers/ères de 3 usines ont parlé de double comptabilité pour les salaires, de falsification des cartes de pointage pour dissimuler les heures supplémentaires travaillées et/ou d’ouvriers/ères obligés à signer de fausses fiches de paye. Dans 2 usines on donnait aux ouvriers/ères un jeu de réponses-type et on les entraînait à répondre aux questions des visiteurs. Des ouvriers/ères d’une troisième usine ont dit qu’ils étaient menacés de licenciement s’ils ne répondaient pas aux questions « correctement ». Des ouvriers d’une de ces usines ont dit que la direction les avait avertis de ne rien dire de négatif aux visiteurs. Dans une usine, les ouvriers/ères ont signalé que les « jeunes » ouvriers étaient retirés de l’usine avant l’arrivée des visiteurs.


Etudes antérieures du CIC sur Disney


En février 1999, le CIC a réalisé un rapport intitulé « Les sœurs de Mulan, travailler pour Disney n’est pas un conte de fée ». Le rapport met en évidence les violations similaires des droits du travail dans 4 usines sous-traitantes de Disney en Chine du Sud. Disney semble avoir arrêté de travailler avec trois d’entre elles. Pour cette raison, le CIC ne va pas révéler les noms des usines qui figurent dans le présent rapport. Plutôt que de couper les ponts et s’enfuir chaque fois qu’on découvre que les lois du travail sont violées, ce qui ne fait que pénaliser un peu plus les ouvriers/ères dont les droits ont été violés, Disney devrait travailler avec ses sous-traitants pour les inciter à respecter la loi du travail chinoise et le code Disney du travail.


Contact : a.j.y.pitchen@intnet.mu


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